Le Haut conseil pour les finances publiques juge cette prévision « volontariste » et s’inquiète du risque qu’un nouveau budget de dépenses risque de faire peser sur le déficit.

« Quoi qu’il en coûte », avait dit le président Macron. Pour soutenir la reprise de l’économie française mise à terre par l’épidémie de Covid-19, le gouvernement va encore ouvrir les vannes de la dépense en 2021, repoussant à plus tard le rétablissement des finances publiques.

Le gouvernement a présenté ce lundi matin le projet de loi de finances pour 2021 en Conseil des ministres, avant une conférence de presse à Bercy. Cette journée doit donner le « la » de l’année à venir : le projet de loi est centré sur le plan de relance de 100 milliards annoncé début septembre, qui complète les quelque 460 Mds € mis sur la table cette année pour faire face à la crise sanitaire et à ses conséquences économiques. « Ce n’est pas parce que les difficultés sanitaires ont repris qu’il faut abandonner l’idée de la relance économique », a défendu le ministre de l’Economie Bruno Le Maire.

L’objectif est de retrouver en 2022 le « niveau de richesse d’avant la crise », a assuré le Premier ministre Jean Castex, un objectif qu’il jugeait « ambitieux mais à notre portée ».

 Un tiers du plan ira à l’écologie, un tiers à des mesures de solidarité et de formation. Le dernier tiers servira à améliorer la compétitivité des entreprises et à favoriser la réindustrialisation du pays, notamment via une baisse de 10 Mds€ des impôts de production pesant sur les entreprises. L’objectif, en soutenant les entreprises, est qu’elles recommencent à embaucher après 800 000 suppressions d’emplois attendues cette année.

 « Très fortes incertitudes »

Grâce à ce plan, le gouvernement table sur un rebond du produit intérieur brut (PIB) de 8 % l’année prochaine, après une contraction historique attendue à 10 % cette année. L’an dernier, avant l’apparition du coronavirus, le gouvernement tablait sur une croissance pour 2020 de 1,3 %.

Le Haut conseil pour les finances publiques (HCFP) n’a pas droit de veto sur le budget mais il peut avoir un mot désobligeant. En guise de diplomatique mise en garde, le HCFP a jugé la prévision de 8 % « volontariste », soulignant les « très fortes incertitudes » qui pèsent encore, du fait du regain épidémique, et de l’endettement du pays.

Dès cette année, le déficit public devrait approcher les 195 Mds€, un record. Et bien que le gouvernement table, pour l’an prochain, sur un déficit de 152,8 milliards, la France va tout de même émettre 260 Mds€ d’obligations à moyen et long terme, selon l’Agence France Trésor, un montant net des rachats et inchangé par rapport à 2020.

La charge budgétaire de la dette est prévue à 37,1 Mds€ l’an prochain, contre 36,2 milliards pour 2020.

Certes, l’Union européenne financera plus de 37 de ces milliards. Mais la crise sanitaire est de plus en plus coûteuse pour la Sécurité Sociale. Après avoir été évaluée à 8 milliards dans le troisième budget rectificatif pour 2020, la facture du Covid a été réévaluée pour 2020 à 10,1 Mds€ par le HCFP, dans un avis consulté par l’AFP. Soit un triplement de la hausse attendue des dépenses d’assurance maladie (+ 7,6 % au lieu de + 2,45).

Des crédits promis aux ministères

Et comme ni l’année ni l’épidémie ne touchent à leur fin, « une nouvelle révision à la hausse des dépenses […] est possible », prévient le Haut conseil. De fortes incertitudes portent notamment sur le coût final des campagnes de tests.

Pour 2021, 4,3 Mds€ ont été prévus dans le budget de la sécurité sociale « pour faire face à la crise sanitaire, notamment pour poursuivre les examens de dépistage de la Covid-19, mettre à disposition des masques à certains publics et engager une éventuelle campagne de vaccination ». Il faudra aussi 7,3 milliards pour financer les « accords de Ségur » destinés à revaloriser l’ordinaire des soignants.

Par ailleurs les crédits promis aux ministères de la Défense, de l’Intérieur ou de l’Education sont également confirmés. Celui de la Justice va connaître une hausse importante de 8 %, a annoncé Jean Castex.

 Afin de rassurer les ménages sur la consommation desquels une bonne partie de la relance s’appuie, le gouvernement a assuré qu’il n’y aurait pas de hausse d’impôts, et que la suppression de la taxe d’habitation se poursuivrait en bénéficiant maintenant aux plus aisés. Pour dégager quelques recettes supplémentaires, il a prévu de ponctionner l’organisme de financement du logement social Action logement à hauteur d’1.3 milliard d’euros, et les complémentaires santé vont payer une surtaxe Covid d’un milliard d’euros l’an prochain (puis 500 millions en 2022).

 Source : Le Parisien