Ce mercredi 30 septembre s’est tenue la première réunion sur l’avenir de la réforme de l’assurance chômage entre les partenaires sociaux et le ministère du Travail. Ce dernier s’est dit prêt à adapter certains paramètres des quatre dispositifs pénalisants de la réforme. Voici les premières pistes qui ont été avancées.

Pas de remise en cause de la réforme de l’assurance chômage, mais d’éventuelles modifications à la marge. C’est ce qui est ressorti de la réunion organisée par le ministère du Travail avec les partenaires sociaux, ce mercredi 30 septembre. “Il n’est pas question de revenir sur son existence, ni de revenir sur sa philosophie. Mais le contexte économique et social a fortement évolué. Il faut donc adapter certains paramètres”, estime l’entourage de la ministre du Travail, Élisabeth Borne.

Pour rappel, toutes les mesures pénalisantes de la réforme de l’assurance chômage ont été repoussées au 1er janvier 2021. Ces mesures concernent le mode de calcul du salaire journalier de référence, la période de travail nécessaire pour ouvrir des droits au chômage et pour les recharger, la dégressivité des allocations chômage pour les plus hauts revenus et le bonus-malus pour les employeurs sur les contrats courts. Pour ces quatre dispositifs, le but des discussions avec les partenaires sociaux est de savoir dans quelles conditions les réactiver au 1er janvier. Voici les premières pistes qui ont été avancées ce mercredi par le ministère du Travail. À noter qu’une prochaine réunion est prévue fin octobre, à l’occasion de laquelle seront présentées des idées plus concrètes, basées sur des études d’impact réalisées avec l’aide de l’Unédic.

Ouverture et rechargement des droits au chômage

C’est le dispositif pour lequel l’exécutif a sans doute le plus fréquemment changé les règles. Avant le 1er novembre 2019, il fallait avoir travaillé 4 mois au cours des 28 derniers (36 derniers pour les plus de 53 ans) pour ouvrir des droits aux allocations chômage. Avec l’application du premier volet de la réforme de l’assurance chômage le 1er novembre dernier, les conditions d’ouverture avaient une première fois changé : il fallait avoir travaillé 6 mois sur une période de référence de 24 mois pour être indemnisé. Mais au mois d’août, pour mieux protéger les demandeurs d’emploi dans le cadre de la crise, le gouvernement a décidé de faire un retour (partiel) en arrière : désormais, il faut avoir travaillé 4 mois sur les 24 derniers mois pour avoir droit à l’indemnisation chômage.

Lors de la réunion ce mercredi, le cabinet d’Élisabeth Borne a réaffirmé sa volonté de revenir à la règle des 6 mois de travail au 1er janvier 2021, selon différents partenaires sociaux présents. Mais on ne sait pas encore quelle sera la période de référence retenue. Problème : avec ce retour aux 6 mois de travail obligatoires pour débloquer de nouveaux droits au chômage, il y a un véritable “trou dans la raquette pour les jeunes et les saisonniers, signale Michel Beaugas, secrétaire confédéral de Force ouvrière. Le ministère s’est dit ouvert aux discussions sur le sujet.” Faut-il s’attendre à des mesures spécifiques pour ces deux publics ? Affaire à suivre !

Par ailleurs, le ministère du Travail souhaiterait que le seuil permettant un rechargement des droits, lorsqu’on travaille pendant sa période de chômage, reste aligné sur les conditions d’affiliation. L’exécutif voudrait ainsi le faire passer de 4 mois actuellement à 6 mois au 1er janvier 2021 (comme pour l’ouverture de nouveaux droits, donc). “Avec un tel alignement, c’est comme si c’était l’ouverture d’un nouveau droit. Il ne s’agit donc pas vraiment d’un rechargement”, estime Éric Courpotin. Alerté par les partenaires sociaux sur le sujet, le gouvernement s’est finalement dit prêt à retravailler sur le seuil de rechargement. Celui-ci pourrait donc être inférieur à 6 mois finalement.

Dégressivité des allocations chômage pour les hauts revenus

Avec cette mesure, les personnes de moins de 57 ans, au chômage depuis le 1er novembre 2019 et qui percevaient un salaire supérieur à 4.500 euros brut par mois devaient connaître, au bout du sixième mois d’indemnisation, une baisse de leur allocation pouvant aller jusqu’à 30%. Mis en suspens depuis le confinement, ce dispositif sera lui aussi de nouveau appliqué au 1er janvier 2021. Mais là encore, le ministère du Travail s’est dit prêt à revoir “tous les paramètres”, nous fait savoir Éric Chevée, le vice-président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). Âge (57 ans), niveau de revenus (4.500 euros brut), niveau de la baisse des allocations (30%), période au bout de laquelle l’indemnité sera réduite (6 mois)… tous ces paramètres pourraient être modifiés.

Bonus-malus sur les contrats courts

C’est la mesure que le patronat rêve de voir disparaître. Pour limiter le recours aux contrats courts, le gouvernement a mis en place un bonus-malus dans sept secteurs d’activité*. Secteurs dans lesquels le taux de séparation moyen est de 150%. Le principe est simple : dans ces secteurs, les entreprises de plus de 11 salariés abusant des contrats courts devront payer davantage de cotisations à l’assurance chômage et, à l’inverse, les bons élèves en paieront moins. Il est prévu que ce bonus-malus soit calculé à partir des fins de contrats de travail constatées sur l’ensemble de l’année 2020. Et c’est à partir du 1er mars 2021 que les entreprises sont censées payer un malus ou profiter d’un bonus. Sauf que l’année 2020 ayant été inhabituelle en termes d’emploi en raison de la crise, le ministère du Travail songe à décaler la période de référence pour le calcul de ce bonus-malus. Ce dispositif pourrait donc réellement entrer en vigueur en 2022 seulement, au lieu de mars 2021.

Par ailleurs, le cabinet d’Élisabeth Borne songerait à revoir la grille de comparaison pour calculer le bonus-malus. Dans la version initiale de la réforme, il est prévu que le montant du bonus ou du malus soit calculé en fonction de la comparaison entre le taux de séparation dans les entreprises concernées et le taux de séparation médian de leur secteur d’activité. Plutôt que de les comparer à leur secteur d’activité, le ministère du Travail aurait proposé, ce mercredi, de faire une comparaison au niveau des entreprises. Le niveau de comparaison serait donc bien plus fin et demanderait beaucoup plus de travail. “Cela créerait une usine à gaz telle que le bonus-malus serait impossible à mettre en place”, craint Éric Couportin.

 

* La fabrication de denrées alimentaires, de boissons, et de produits à base de tabac ; les autres activités spécialisées, scientifiques et techniques, comme le secteur de la publicité ; l’hébergement et la restauration ; la production et la distribution d’eau-assainissement, gestion des déchets et dépollution ; le transport et l’entreposage ; la fabrication de produits en caoutchouc et en plastique, et d’autres produits non-métalliques ; le travail du bois, industrie du papier et imprimerie.

Par CAPITAL, Sarah Asali.