Légalité des « cookie walls » : quels sont les critères de la CNIL?

Depuis plusieurs mois, des sites web et applications mobiles utilisent ce qu’on appelle des « murs de traceurs » ,ou « cookie walls » en anglais. Régulièrement interrogée sur le sujet, la CNIL a publié des premiers critères permettant d’évaluer la légalité d’une telle pratique le 16 mai dernier.

Qu’est-ce qu’un cookie wall?

 

L’accès aux différents services proposés sur Internet est souvent présenté comme gratuit. Cependant, cette gratuité s’accompagne généralement de la collecte et de l’utilisation des données personnelles des internautes. En effet, afin de financer les services proposés, les acteurs du web peuvent recourir à différentes méthodes comme la publicité ciblée. Ainsi, le dépôt de cookies et d’autres traceurs permet, entre autres, de collecter des informations sur un internaute telles que son âge, son lieu de résidence, ses centres d’intérêt, ou encore, ses habitudes de consommation. Ces informations permettront par la suite de lui proposer des publicités qui sont susceptibles de l’intéresser et donc de générer un achat.

Néanmoins, face aux exigences européennes liées au recueil du consentement préalable de l’internaute au dépôt de ces traceurs, de nombreux sites ont choisi de recourir à un cookie wall. Cette pratique consiste à bloquer l’accès au contenu d’un site pour les utilisateurs qui refusent le dépôt de cookies ou la consultation des cookies déjà enregistrés par l’éditeur du site. En pratique, cela se traduit souvent par un bandeau qui demande à l’internaute de cliquer sur le bouton « J’accepte les cookies » afin de pouvoir entrer sur le site. A défaut de consentement, l’accès au contenu est alors rendu impossible.  En cas de refus des traceurs par les internautes, certains éditeurs de site proposent aux internautes un choix alternatif consistant pour ces derniers à devoir fournir une autre contrepartie. Cela leur permet alors de compenser la perte de revenus publicitaires résultant de l’absence de traceurs par un autre moyen de rémunération. En général, la contrepartie est financière; on parle alors de « paywall » parce que l’internaute doit payer pour accéder au site.

Précédemment, la Cnil avait considéré « que le consentement ne peut être valable que si la personne concernée est en mesure d’exercer valablement son choix et ne subit pas d’inconvénients majeurs en cas d’absence ou de retrait du consentement » (Délib. 2019-093 art. 2, al. 4). Cependant, dans une décision du 19 juin 2020, le Conseil d’État a jugé que l’exigence d’un consentement libre ne pouvait pas justifier une interdiction générale de la pratique des cookies walls. Ainsi, ce dernier avait déterminé que la liberté du consentement de l’utilisateur d’un site doit être appréciée au cas par cas, en tenant compte notamment de l’existence d’alternatives réelles et satisfaisantes proposées en cas de refus des cookies. La CNIL a alors révisé sa position dans ses dernières lignes directrices (Délib. Cnil 2020-091 et 2020-092 du 17-9-2020 : BRDA 22/20 inf. 26). Dans l’attente du futur règlement européen «  ePrivacy » ou d’une décision de la CJUE, la Cnil a publié le 16 mai 2022 des critères permettant aux professionnels d’évaluer la légalité des « cookie walls ».

Cookie wall: l’internaute dispose-t-il d’une alternative équitable pour accéder au contenu ?

 

 

Dans la lignée de la décision du Conseil d’Etat, la Cnil recommande aux éditeurs de site internet de proposer une alternative réelle et équitable permettant d’accéder au site et qui n’implique pas de devoir consentir à l’utilisation de leurs données. A défaut d’alternative, l’éditeur devra pouvoir démontrer que son service est également accessible sur un autre site sans cookie wall. La Cnil recommande alors à l’éditeur de veiller à ce que cette alternative soit facile d’accès pour l’utilisateur, afin d’éviter tout déséquilibre entre lui et l’internaute et de potentiellement priver ce dernier d’un véritable choix.

Ce déséquilibre on peut notamment le retrouver en cas d’exclusivité de l’éditeur sur les contenus ou services proposés. C’est par exemple le cas des services administratifs qui ne peuvent pas conditionner l’accès à une téléprocédure à l’acceptation de cookies non nécessaires au fonctionnement du site. On le retrouve aussi lorsque l’internaute n’a que peu ou pas d’alternatives au service, comme pour les services dominants ou incontournables, l’internaute ne disposant alors pas d’un choix réel de les consulter ou non.

L’alternative est payante (paywall): le tarif est-il raisonnable?

 

Conditionner l’accès à un contenu, soit à l’acceptation de traceurs contribuant à rémunérer son service, soit au paiement d’une somme d’argent, n’est pas interdit puisque cela constitue une alternative au consentement aux traceurs. Cependant, l’alternative du paywall n’en est une que si le tarif est raisonnable indique la Cnil. Cette dernière précise que ce caractère raisonnable doit relever d’une analyse au cas par cas. Par souci de transparence, elle encourage ainsi les éditeurs à publier leur analyse. Par ailleurs, elle précise qu’il appartiendra à ces derniers de justifier du caractère raisonnable de la contrepartie monétaire proposée.

Le mode de financement n’a pas systématiquement à prendre la forme d’un abonnement payant au site pour y accéder sans traceurs. En effet, l’éditeur peut notamment offrir un accès ponctuel payé au moyen d’un porte-monnaie virtuel (via Paypal, Apple pay ou Google Pay par exemple), sans que l’internaute n’ait à enregistrer ses données de carte bancaire auprès de l’éditeur.

En outre, la Cnil invite les éditeurs de site imposant aux internautes la création d’un compte à s’assurer qu’une telle obligation est justifiée par rapport à la finalité visée. Cette création de compte peut par exemple être justifiée lorsqu’il s’agit de permettre à un utilisateur qui a souscrit à un abonnement d’en bénéficier sur d’autres terminaux. Dans ce cas, l’éditeur doit alors informer les internautes de l’usage de leurs données et limiter la collecte de données aux données nécessaires à la finalité poursuivie. De plus, s’il souhaite réutiliser les données collectées lors de la création du compte pour d’autres finalités, il devra s’assurer d’en avoir préalablement informé l’internaute et recueillir, si nécessaire, son consentement pour ces nouveaux objectifs.

 

Des « cookie walls »  ou « paywalls »  limités à l’objectif poursuivi

 

La Cnil indique que l’éditeur doit informer les internautes des finalités pour lesquelles il est nécessaire de consentir au dépôt de cookies pour accéder au service. En effet, le cookie wall doit être limité aux finalités permettant une juste rémunération du service proposé. Par exemple, si un éditeur considère que la rémunération de son service dépend des revenus qu’il pourrait obtenir de la publicité ciblée, seul le consentement à cette finalité doit être nécessaire pour accéder au service. A contrario, le refus de consentir à d’autres finalités, comme la personnalisation du contenu éditorial par exemple, ne doit pas empêcher l’accès au contenu du site.

 

Je n’ai pas consenti aux cookies : dans quels cas des traceurs peuvent-il tout de même être déposés ?

 

En principe aucun cookie non nécessaire au fonctionnement du site web ne peut être déposé sur le terminal de l’internaute ayant refusé un tel dépôt. Cependant, l’accès à des contenus hébergés sur des sites tiers (comme une vidéo) ou à un service demandé par l’utilisateur (comme le partage du contenu sur les réseaux sociaux) peut parfois entraîner le dépôt de traceurs par ces sites tiers.

Dans ce cas, le consentement de l’utilisateur pourrait être recueilli lorsque l’utilisateur souhaite activer le contenu, par exemple, via une fenêtre dédiée qui s’affiche. L’internaute devra toujours avoir la possibilité de se rendre de lui-même dans les paramétrages du site pour consentir à certains usages, ou non.

Source :  CNIL

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