L’ordonnance n° 2020-318 publiée au JO du 26 mars 2020 proroge les délais d’établissement des comptes annuels et consolidés des entités non cotées. Concernant les entités cotées, l’AMF aménage le calendrier de publication des comptes annuels et semestriels. Cette ordonnance proroge également les délais d’approbation des comptes pour l’ensemble des entités.

Par PwC, auteur du Mémento Comptable 

Pour les sociétés non cotées, les délais pour arrêter les comptes annuels et consolidés sont prorogés

Une prorogation de trois mois pour arrêter les comptes dans les SA à directoire

Le délai imparti au directoire (en principe de 3 mois après la clôture de l’exercice), pour présenter au conseil de surveillance les comptes annuels, le cas échéant les comptes consolidés, le rapport de gestion et le rapport sur le gouvernement d’entreprise (Ord. 2020-318 art. 1) :

– est prorogé de 3 mois,

– pour les sociétés clôturant leurs comptes entre le 31 décembre 2019 et le 25 juin 2020 (sauf prorogation de l’état d’urgence sanitaire).

Le directoire aura donc jusqu’au 30 juin 2020 au plus tard pour arrêter les comptes lorsque l’exercice comptable correspond à l’année civile.

Une prorogation de deux mois pour arrêter les comptes dans les sociétés tenues d’établir les documents de gestion prévisionnelle

Les sociétés soumises à l’obligation d’établir les quatre documents liés à la prévention des difficultés des entreprises pourront établir leurs comptes annuels et le cas échéant consolidés (Ord. précitée art. 4) :

– dans les 6 mois de la clôture de l’exercice au lieu de 4 mois normalement,

– pour celles clôturant leurs comptes annuelles et semestrielles entre le 30 novembre 2019 et le 25 juin 2020 (sauf prorogation de l’état d’urgence sanitaire).

Pour rappel, sont tenues d’établir ces documents (situation de l’actif réalisable et disponible et du passif exigible, compte de résultat prévisionnel, tableau de financement et plan de financement prévisionnel), les sociétés comptant 300 salariés ou plus ou dont le montant net du chiffre d’affaires est égal à 18 millions d’euros.

La nouvelle ordonnance proroge donc de deux mois les délais imposés aux conseils d’administration, aux directoires ou aux gérants pour établir l’ensemble des documents (y compris la situation de l’actif réalisable et disponible et du passif exigible, le compte de résultat prévisionnel, le tableau de financement et plan de financement prévisionnel).

L’organe en charge de l’arrêté des comptes aura donc jusqu’au 30 juin 2020 au plus tard pour arrêter les comptes lorsque l’exercice comptable correspond à l’année civile.

Une prorogation pour arrêter les comptes dans les sociétés dont la date butoir d’arrêté des comptes s’apprécie par rapport à la date de l’AG

Dans les sociétés dont la date butoir d’arrêté des comptes s’apprécie par rapport à la date de l’assemblée générale, la mesure permettant de reporter de 3 mois au plus la tenue de l’AG d’approbation des comptes (voir ci-après) emporte implicitement le report de la date d’arrêté des comptes.

A titre d’exemple, prenons une SA (non tenue d’établir les documents de gestion prévisionnelle) à conseil d’administration, dont l’arrêté des comptes doit avoir lieu au plus tard 45 jours avant l’AG pour celles. Si elle décide de tenir son AG d’approbation des comptes le 30 septembre 2020, elle a donc :

– jusqu’au 15 août 2020 au plus tard pour établir ses comptes annuels (et consolidés), si elle est dotée d’un commissaire aux comptes,

– jusqu’au 15 septembre 2020 au plus tard pour établir ses comptes annuels (et consolidés), si elle n’est pas dotée d’un commissaire aux comptes.

A noter : Selon nos informations, les délais limites de dépôt des déclarations de résultat devraient être reportés par l’administration au 31 mai 2020. En conséquence, dans tous les cas de prorogation ci-avant décrits, la liasse fiscale sera potentiellement déposée avant la date d’arrêté des comptes. Dans ce cas, la réalisation d’ajustements du résultat comptable postérieurs à ce dépôt pourrait rendre nécessaire l’établissement d’une liasse fiscale rectificative, qu’il ait ou non un impact en définitive sur le résultat taxable.

Pour les sociétés cotées, aucune prorogation prévue par les textes mais un calendrier aménagé par l’AMF

Aucune prorogation des délais pour arrêter les comptes n’est prévue par l’ordonnance lorsque la société est cotée sur un marché réglementé et est tenue à ce apport financier annuel et un rapport financier semestriel.

En effet, les délais de publication de ces rapports (dans les 4 mois de la clôture de l’exercice pour le rapport financier annuel et dans les 3 mois qui suivent la fin du premier semestre pour le rapport financier semestriel) sont issus de la Directive européenne « Transparence ». Il n’est donc pas possible d’y déroger légalement en droit français.

Toutefois, compte tenu de la situation, et des difficultés rencontrées par les émetteurs dans la préparation des rapports financiers, l’AMF a invité ceux qui ne pourraient pas publier leur rapport financier dans les délais, à communiquer à l’AMF et au marché (Communiqué AMF 30-3-2020) :

– toute anticipation d’un éventuel retard de publication sur le calendrier réglementaire ;

– les raisons de ce retard ;

– et une date prévisionnelle de publication.

Pour en savoir plus sur le communiqué de l’AMF sur ce sujet : voir le FRC 5/20 à paraître

Les comptes annuels peuvent être arrêtés par visioconférence

L’ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 étend et assouplit exceptionnellement (et de façon temporaire) le recours aux moyens de visioconférence et de télécommunication pour les organes collégiaux d’administration, de surveillance ou de direction, que celui-ci soit déjà prévu par la loi ou les dispositions réglementaires ou non.

Ainsi (Ord. précitée art. 8) :

– le recours à ces moyens est autorisé pour l’ensemble des réunions de ces organes, y compris celles relatives à l’arrêté ou à l’examen des comptes annuels ;

– les clauses contraires des statuts sont neutralisées, et l’existence de dispositions à cet effet dans le règlement intérieur n’est plus une condition de recours à ces moyens.

A noter La disposition de l’ordonnance permettant la réunion à distance des organes de gouvernance est prise à titre temporaire jusqu’au 30 juillet 2020 avec un effet rétroactif au 12 mars 2020 permettant de régulariser les réunions qui se sont déjà tenues à distance.

Pour en savoir plus sur la participation à distance des organes dirigeants collégiaux aux réunions : voir le FRC 5/20 à paraître

Une prorogation de trois mois pour faire approuver les comptes par l’assemblée générale

Les délais pour convoquer l’assemblée et pour faire approuver les comptes et les documents qui y sont joints sont prorogés de 3 mois pour toutes les sociétés clôturant leurs comptes entre le 30 septembre 2019 et l’expiration d’un délai d’1 mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire (Ord. n° 2020-319 du 25-3-2020, art. 3).

Une société ayant clôturé ses comptes au 31 décembre 2019 aura donc jusqu’au 30 septembre 2020 pour faire approuver ses comptes (au lieu du 30 juin 2020 normalement).

A noter Cette prorogation ne s’applique toutefois pas aux sociétés ou entités dont le commissaire aux comptes a émis un rapport sur les comptes avant le 12 mars 2020.

Les membres de l’assemblée doivent être informés du report

Les membres de l’assemblée doivent être informés par tout moyen du report, permettant d’assurer leur information effective (Ord. n° 2020-321 du 25-3-2020 art. 7).

Le dépôt des comptes en est reporté

Le dépôt des comptes au greffe du tribunal de commerce intervenant dans le mois (ou dans les 2 mois lorsque le dépôt est effectué par voie électronique) de l’approbation des comptes par l’organe délibérant, il sera de fait lui aussi reporté.

Si les sociétés décident de ne pas reporter la date de l’AG et d’organiser une AG à huis-clos

Les sociétés peuvent décider de ne pas reporter la date de tenue de l’assemblée générale d’approbation des comptes et d’organiser alors une assemblée à huis-clos, c’est-à-dire sans la présence physique des participants (membres de l’assemblée et autres personnes ayant le droit d’y assister : par exemple, commissaires aux comptes) et sans participation par conférence téléphonique ou audiovisuelle (Ord. 2020-321 précitée art. 4, al. 1).

Dans ce cas, le Ministère de l’Economie et des Finances a précisé les points suivants (« Foire aux Questions du 26 mars 2020 » ; www.tresor.economie.gouv.fr) :

– si la décision est prise avant que les formalités de convocation n’aient commencé, l’information peut être assurée par ces formalités de convocation ;

– si au contraire, la décision est prise alors que les formalités de convocation ont déjà commencé, un régime spécifique d’information est prévu.

Dans ce dernier cas :

– les formalités déjà accomplies n’ont pas à être renouvelées ;

– les membres de l’assemblée sont informés par tous moyens permettant d’assurer leur information effective trois jours ouvrés au moins avant la date de l’assemblée (sauf dans les sociétés cotées, où l’information est assurée par voie de communiqué, voir le FRC 5/20 à paraître) ;

– les formalités restant à accomplir doivent l’être dans les conditions ordinaires.

Dans tous les cas, l’information donnée aux membres de l’assemblée doit porter sur le fait que l’assemblée se tient « à huis clos », la date et l’heure de l’assemblée, ainsi qu’une description claire et précise des conditions dans lesquelles ils pourront exercer l’ensemble de leurs droits en tant que membre de l’assemblée (en particulier le droit de voter).

Pour en savoir plus sur l’organisation de l’assemblée à huis-clos (convocation, participation des actionnaires…) : voir le FRC 5/20 à paraître

Voir également les bonnes pratiques énoncées par l’AMF à l’attention des émetteurs organisant leur assemblée générale à huis-clos, dans le  FRC 5/20 à paraître